Objectif. Cette revue aborde la préoccupation croissante liée aux infections associées aux soins chez les patients bénéficiant d’une oxygénation par membrane extracorporelle (ECMO) ou d’une épuration extrarénale continue (EERC). Avec l’augmentation du recours à ces techniques, en particulier chez les patients en réanimation, les complications infectieuses demeurent fréquentes, souvent sous-diagnostiquées et insuffisamment prises en compte dans les recommandations actuelles. Cette revue paraît à un moment opportun, compte tenu de la nécessité urgente d’harmoniser les stratégies diagnostiques et préventives dans cette population à haut risque. Données récentes. Les études récentes mettent en évidence l’origine multifactorielle du risque infectieux chez les patients sous ECMO ou EERC, incluant une immunoparalysie liée aux dispositifs. Chez les patients sous ECMO, les infections nosocomiales — en particulier les pneumonies associées à la ventilation mécanique (PAVM), les bactériémies (BSI) et les infections liées aux canules — figurent parmi les complications les plus fréquentes, avec une incidence comprise entre 9% et 64%. Les PAVM et les bactériémies surviennent respectivement jusqu’à 61 et 38 épisodes pour 1 000 jours-ECMO. Les pathogènes prédominants sont les entérobactéries, les bacilles à Gram négatif non fermentants, les Enterococcus spp. et les champignons. Les bactériémies à Enterococcus sont particulièrement sous-reconnues et souvent traitées de manière inadéquate. La durée du support ECMO constitue le facteur de risque le plus constant, associée à la gravité de la maladie et à la co-initiation d’une EERC. Les infections nosocomiales entraînent une augmentation relative de la mortalité estimée à 32%. Synthèse. Les infections nosocomiales chez les patients sous ECMO ou EERC sont fréquentes, difficiles à diagnostiquer et fortement associées à un pronostic défavorable. Leur prévention et leur prise en charge nécessitent une approche intégrée et individualisée. L’adoption de définitions standardisées, l’amélioration de la surveillance et une politique raisonnée d’antibiothérapie sont indispensables pour réduire les risques dans cette population particulièrement vulnérable.
Gaillet A, Timsit JF. Infection risks in patients treated by continuous renal replacement therapy and extracorporeal membrane oxygenation. Curr Opin Crit Care. 2025;31(5):539-546. Doi : 10.1097/MCC.0000000000001315.